Laurent Louis provoque l'écoeurement des députés qui le boycottent
Jean-Denis Lejeune a fait savoir jeudi soir à l'agence Belga, par l'intermédiaire de son avocat, qu'il demande la démission du député Laurent Louis. Cette prise de position fait suite à la tenue d'une conférence de presse ce jeudi au cours de laquelle Laurent Louis a annoncé le diffusion sur son blog du rapport d'autopsie de Julie et Mélissa, deux victimes de Dutroux, et lors de laquelle il a exhibé deux photos de l'autopsie.
Mardi, une plainte avec constitution de partie civile avait déjà été déposée auprès d'un juge d'instruction liégeois par Me Jean-Yves Marichal, l'avocat qui représente Jean-Denis Lejeune. Cet avocat a confirmé qu'il informera prochainement le juge d'instruction des nouveaux développements de l'affaire.
Jean-Denis Lejeune a également lancé un appel à la démission de Laurent Louis. "Indépendamment des poursuites pénales et civiles, Jean-Denis Lejeune estime que Laurent Louis devrait avoir la décence de quitter ses fonctions parlementaires compte tenu de son comportement indigne et irresponsable", a indiqué Me Jean-Yves Marichal.
Les députés boycottent Laurent Louis et exigent un cordon sanitaire
Ce jeudi matin, Laurent Louis, le député du Mouvement pour la Liberté et la Démocratie, a organisé une conférence de presse ayant pour objet la pédophilie. Au cours de celle-ci, il a dénoncé l'existence de réseaux et brandi deux photos issues du rapport d'autopsie de Julie et Mélissa. Le député a ensuite publié sur son blog l'intégralité de ce rapport d'autopsie et a lancé une invitation aux citoyens qui désiraient examiner les photos de ces deux victimes de Marc Dutroux.
Quelques heures plus tard, lorsque Laurent Louis est monté à la tribune du Parlement pour poser une question sur la situation dans les prisons, l'ensemble des députés a quitté l'hémicycle à l'exception de quatre députés, trois Vlaams Belang et Jean-Marie Dedecker.
André Flahaut (PS), le président de l'assemblée, a quant à lui souligné qu'il s'agissait "d'un jour triste pour la démocratie". "L'immunité parlementaire ne permet pas tout. Nous aurons l'occasion de le voir dans les prochains jours", a-t-il ajouté à l'adresse de Laurent Louis. Dans un communiqué, André Flahaut a ensuite "déploré cette attitude nauséabonde qui constitue une dérive inacceptable, surtout dans le chef d'un représentant de la Nation. Dans l'état actuel des choses, le président de la Chambre ne peut constitutionnellement agir, sauf sur requête de la justice."
Vers un cordon sanitaire ?
Les parlementaires fédéraux Ecolo-Groen ont plaidé pour l'imposition d'un cordon sanitaire vis-à-vis de Laurent Louis. Depuis l'entrée au Parlement de ce dernier, les écologistes "s'abstiennent de commenter ses délires pour éviter de lui donner une publicité qu'il ne mérite pas", ont indiqué Muriel Gerkens, Jacky Morael et Stefaan Van Hecke dans un communiqué. Ils considèrent cependant qu’avec sa conférence de presse de ce jeudi, l'homme a dépassé "les bornes de ce qui est acceptable non seulement sur le plan politique mais aussi tout simplement sur le plan humain et moral".
Le cdH a de son côté qualifié l'attitude de Laurent Louis d'"ignoble et totalement indigne d'un représentant qui se dit du peuple". Divulguer des pièces de l'instruction liées à l'affaire Dutroux est pénalement répréhensible, a rappelé le cdH qui demande à la Justice d'intervenir "dans les plus brefs délais" pour arrêter la diffusion de ces documents.
Interrogée vendredi matin sur les ondes de la Première, la vice-première ministre Joëlle Milquet a exprimé son profond dégoût. "On a atteint, dans le monde démocratique et politique les confins de l’abject. Je suis outrée, choquée... J’avais les larmes aux yeux quand j’ai eu Jean-Denis Lejeune hier tellement c’est une attitude de non-respect par rapport aux parents, par rapport aux petites filles elles-mêmes… ". Pour Joëlle Milquet, "nous devons tous réagir. C’est très bien que les élus aient quitté l’hémicycle mais il faut voir maintenant comment l’immunité parlementaire (de Laurent Louis, NDLR) peut être retirée : il y a là des fait qui sont répréhensibles pénalement sur différents chefs (…) et je pense que l’appareil judiciaire doit se mettre en route dans tout ce qu’il peut faire ".
La "dernière provocation" de Laurent Louis
Le chef de groupe MR à la Chambre, Daniel Bacquelaine, a appelé à son tour à l'établissement d'un cordon sanitaire autour de Laurent Louis. Selon les réformateurs, le député s'est mis au ban de l'assemblée après sa conférence de presse. "Rien n'aura été épargné aux familles des victimes de Dutroux et consorts", a déclaré Daniel Bacquelaine. "Ce comportement est totalement indigne. J'invite tous les membres de la Chambre à établir un véritable cordon sanitaire à l'égard de ce monsieur. Il se met, par ses actes, au ban de notre assemblée", a-t-il ajouté.
Le PS s'est déclaré profondément choqué par la "dernière provocation" de Laurent Louis. Il a appelé lui aussi à ce que le député soit traité de la même manière que les parlementaires d'extrême-droite, c'est-à-dire selon le principe du cordon sanitaire. "Pour le PS, il n'a jamais fait aucun doute que les discours et l'idéologie véhiculés par ce parlementaire relèvent de l'extrême-droite, et que Laurent Louis doit donc être traité comme tel", a souligné le parti. Les socialistes espèrent en outre que la justice interviendra le plus rapidement possible pour faire cesser la divulgation de toute pièce relative au dossier Dutroux.
RTBF avec Belga